Le Groupe de Recherche sur les Cétacés alerte sur les conséquences écosystémiques
La planification du gouvernement pour le développement des centrales éoliennes en mer ne laisse aucun doute sur la trajectoire très ambitieuse voulue pour cette énergie dite verte, ou en l’occurrence bleue. La ruée vers l’or bleu, c’est de cela qu’il s’agit, n’est peut-être pas une si bonne affaire que cela pour les émissions de CO2 (qu’il faut diminuer rapidement), mais elle est lourde de conséquences pour les écosystèmes marins concernés sur toutes les façades ou presque.
Il ne s’agit pas ici d’être anti-éolien en mer, comme d’autres sont anti-nucléaires, par idéologie : le débat énergétique et la lutte contre le réchauffement climatique sont trop sérieux pour être laissés aux idéologues de tous poils. Il s’agit de militer pour un mix énergétique robuste, vertueux en termes de CO2, et peu destructeur d’espaces et d’espèces naturelles.
Le problème de cette massification de l’Éolien en Mer est qu’elle n’est pas énergétiquement robuste, qu’elle aboutira à des productions de CO2 peu évoquées pour l’instant, et qu’elle détruira des milliers de kilomètres carrés d’espaces marins.
Actuellement peu élevée, la puissance électrique installée en mer va atteindre rapidement 2000 MW, puis doubler d’ici 2023, et encore doubler d’ici 2028. Ensuite, le gouvernement souhaite que les centrales électriques marines accroissent leur puissance de 1000 MW par an (une très grosse centrale actuelle). Or cette production électrique est intermittente et non pilotable (pas de vent pas d’électricité, trop de vent pas d’électricité), elle atteint péniblement un rendement de 25% en France (on nous promet plus dans l’avenir, bien sûr). Elle n’est pas robuste car elle peut s’interrompre à tout moment de l’année, et sur le pays entier (cas d’un bel anticyclone sur la France).
Comment faire pour avoir de l’électricité quand ces éoliennes ne tournent pas : (1) on demande aux voisins, (2) on en produit autrement. On oublie le photo-voltaïque comme production de masse en France (mais dans le Sahara, oui). L’hypothèse (1) n’est pas viable car les voisins ne produisent pas assez pour remplacer les dizaines de milliers de MW éoliens qui seront installés en France, mais seront devenus inutiles pour plusieurs jours. Pour la solution (2), on allume les centrales à gaz qu’on aura installées EN PLUS des éoliennes pour pallier les ‘intermittences’, ou bien on compte sur les centrales nucléaires qu’on aura construites pour la même raison. Les centrales à gaz produisent du CO2, les centrales nucléaires … personne n’adore en avoir une à deux kilomètres de chez soi.
C’est ici que l’on doit aborder le problème du NIMBY (not in my back yard = pas dans mon jardin), le méga-problème du NIMBY de l’éolien en mer : car les habitants du littoral ne veulent pas non plus voir ces hélices géantes (rien à voir avec les moulins à vent de Don Quichotte); alors elles seront installées loin en mer, là où normalement les animaux marins sont tranquilles (enfin, on en pêche des dizaines de milliers de tonnes quand même).
Et oui, on veut bien brancher son four, son lave-vaisselle, son écran plat, sa voiture, etc., mais on NE VEUT PAS voir l’usine électrique. Donc les moches centrales électriques seront chez les oiseaux (il s’en tuera des milliers chaque année), les mammifères marins, les autres animaux, les navigateurs et les pêcheurs (ces derniers seront méga-récompensés par une super taxe sur la puissance installée, condition sine qua non à leur acquiescement).
Les effets sur les écosystèmes marins ne sont pas prévisibles à une telle échelle, donc, du côté de la modification des communautés d’organismes marins … on verra plus tard. En d’autres termes, le principe de précaution, qui a été inscrit dans notre constitution, et bien le gouvernement s’en bat l’œil. C’est une vieille manie de ce pays d’écrire des lois pour ne pas les respecter. Qu’importe … les milliards vont couler à flot, l’espace marin va changer de visage … le reste, on verra aussi plus tard.
Aux esprits chagrins qui clament « C’est l’éolien en mer ou la catastrophe » comme d’autres clamaient avant eux « Le nucléaire ou la bougie », nous répondons : d’abord on économise 500 MW par an pendant 20 ans, ensuite on réfléchit à un mix énergétique robuste, sans exclure le nucléaire et en équilibrant les énergies renouvelables en fonction des potentiels locaux (éolien ici, solaire là, biomasse ici, …). Et surtout, on met ça en place gentiment en prenant le temps de bien étudier les impacts sur les écosystèmes.
Ce qui signifie aussi ne pas remplir les poches des actionnaires et des lobbies les plus voraces au détriment des espaces naturels en mer.
Car sous le sceau de l’urgence climatique … il y a la ruée vers l’or bleu !
Alexandre et cetaces.org