Malgré le moratoire, les chasses continuent
Il faut avoir un certain âge pour se souvenir de la joie procurée par l’annonce en 1982 du moratoire sur la chasse commerciale à la baleine, devenu effectif en 1986. On est donc chaque année content de voir que les partisans d’une reprise de la chasse n’ont pas obtenu la majorité des 2/3 requise pour inverser cette décision, à la Commission Baleinière Internationale.
Toutefois, depuis 1986, 25 862 baleines (Rorqual Minke, de Bryde, ou commun) ont été tuées par des pays ayant objecté au moratoire, mais restés membres de la CBI quand même: il s’agit de la Norvège, rejointe en 2006 par l’Islande.
Il est quand même curieux que des touristes choisissent ces deux pays comme destination de ‘whale-watching’.
Autre classe de chasse, autorisée par le CBI celle-ci, la chasse pour subsistance aborigène: ces peuples de l’Arctique (essentiellement) doivent bien se porter car ils ont consommé au moins 10 832 baleines depuis 1986 (B. du Groenland, grise, Minke, ou à bosse, essentiellement.
Si la cause des peuples autochtones ne nous laisse pas indifférents, on peut s’étonner des quotas quasi-industriels qui leur sont octroyés année après année: depuis 1986, 1592 Baleines du Groenland pour l’Alaska américain, 4951 Minke groenlandais, ou 3787 Baleines grises pour les Tchouktches russes, par exemple. N’y aurait-il pas quelque activité commerciale sous-jacente à cette ‘chasse culturelle’ ?
Enfin, la plus décriée des chasses pratiquées, la chasse scientifique, s’est octroyée une hécatombe de 17 243 baleines (Minke et Sei, pour l’essentiel), son champion toutes catégories étant bien sûr le Japon. L’Islande et la Norvège (richissime pays pétrolier qui mange à tous les râteliers) profitent parfois de cette modalité.
J’ai ouï dire que certains touristes ont leur moment de gloire en se vantant d’avoir goûté de la viande de baleine ou de dauphin dans un restaurant de Tokyo ou d’ailleurs. Espérons au moins que la digestion de leur steak aura été difficile.
De 1986 à 2016, 53 937 baleines sont ainsi passées de vie à trépas en perpétuant les pratiques de chasse, qui il est vrai ont fait des millions de victimes dans le passé.
Le moratoire est tout relatif, donc.
Mais prenons garde qu’avec l’avènement de l’anthropocène, ère de l’exploitation sans borne de toutes les ressources de la planète, ce moratoire ‘à trous’ ne soit renversé à la faveur d’un vote fatal.
Car les droits à la vie des baleines sont pas inscrits dans le marbre.
Alexandre et cetaces.org
Note: les chiffres ci-dessus sont extraits de tableaux de la CBI.